Résumé

Ce livre contient des entretiens accordés par le violoncelliste Pablo Casals au journaliste nord-américain Albert E. Kahn, que celui-ci a choisi de rédiger sous la forme de mémoires de Casals lui-même. Qui a probablement approuvé le texte définitif. Ce livre a une inestimable valeur, car il nous permet de nous rappeler que ce musicien exceptionnel (il suffit d'entendre son enregistrement des suites pour violoncelle seul de Bach, datant de 1938, pour s'en convaincre) fut aussi un homme de cœur. Le début du livre retrace son enfance et sa formation musicale, sur lesquelles de bonnes fées se sont penchées pour permettre l'éclosion de son génie. Ce n'est, à mon sens, pas la partie la plus intéressante du livre. Celui-ci en comporte deux. La première décrit son retour et son activité musicale à Barcelone de 1919 à 1939. Il y créa un orchestre, Orquesta Pau Casals, pour faire connaître aux catalans, outre les grands compositeurs classiques, les compositeurs espagnols jusqu'alors peu joués et les grands solistes internationaux de l'époque. Plus novateur, il organisa, dès 1928, avec les syndicats ouvriers des concerts de musique classique à très bas prix destinés à être accessible à un très large public. Dès cette époque il refusa de se produire dans les états soumis à des gouvernements fascistes. Cet engagement, objet de la seconde partie passionnante du livre, se prolongea par son opposition farouche au coup d'état de Franco et, finalement, par sa fuite d'Espagne où il ne revint jamais. Créant le festival de musique de Prades, en Catalogne française, pour se rapprocher autant que possible de cette patrie adorée et refusée pour des raisons morales. Il ne cessa par la suite d'agir en faveur de la paix, créant en 1962 son oratorio "El Pessebre" qu'il emmena en tournée dans le monde entier. Cet inaltérable utopiste déclarait à l'ONU en 1963: "Une fois de plus, j'exhorte mes amis les musiciens du monde entier à mettre leur art au service de l'humanité, pour créer entre les hommes des liens de fraternité". Aujourd'hui, et c'est très heureux, un musicien comme Daniel Barenboïm a repris, sous une forme différente, le même flambeau.