Coup de cœur

Intervilles, Santa Barbara, Nirvana, Tropico, tout cela évoque les années 90. On est dans une petite ville de l’est de la France qui fait penser à Hayange après la fermeture de ses hauts fourneaux. Dans la torpeur de quatre étés, on va suivre des adolescents qui s’ennuient et rêvent d’une vie différente de celle de leurs parents, victimes résignées de la crise de la sidérurgie et du chômage. Nicolas Mathieu aborde ce thème sous la forme d’un récit d’apprentissage d’une grande force romanesque. C’est un très beau roman, avec un véritable regard sociétal et politique, qui nous emporte comme le ferait une série télévisée. C’est un portrait de la France d’aujourd’hui à travers sa jeune génération. C’est une chronique à la fois amère et pleine de vie, portée par l’énergie d’une jeunesse qui rend tout possible. Les personnages sont très attachants. Été après été on a vraiment envie de savoir ce que vont devenir Anthony, Hacine et Stéphanie. L’écriture vraie, très charnelle, parfois crue, peut nous « bousculer » mais elle rend bien compte du contexte. Chaque été est ponctué par une chanson qui correspond à une musique de l’époque. Le livre se termine en 1998 avec I will survive, l’hymne qui accompagnait les Bleus pendant la Coupe du Monde. Le titre, dont on a l’explication dès l’exergue est une citation de l’Ecclésiaste. Impossible de ne pas faire de lien avec l’actualité après la lecture de ce Goncourt et de ne pas chanter avec Lavilliers « Travailler encore, cheminée muette, portail verrouillé ». (A.P.)